Qui êtes-vous ?

La rencontre... Désespoirs...

Liste de mes textes : Pour lire: clic sur le titre choisi.
Pour les commentaires "anonymes" merci de laisser un nom ou un prénom .

Bonjour mes ami(e)s !

Membres

vendredi 24 août 2018


Les secouristes du dimanche

Je venais juste d'acquérir ma deuxième voiture, une jolie Simca 1000, couleur bleue métallisée.
Afin de la roder, un dimanche matin, je pris le
chemin du bois de Vincennes à Paris pour faire, en toute quiétude, quelques kilomètres.
Cela faisait une petite demi-heure que je tournais quand je vis sur le bas-côté de la route un corps allongé.
Je n'hésitais pas. La réminiscence d’accomplir une bonne action comme au temps où j'étais scout. Je me garais ainsi qu'une autre voiture conduite par un jeune homme.
Nous constations que la personne était âgée, de forte corpulence, assez élégant. Il avait le visage très rouge, un peu de bave aux lèvres, respirait à peine.
Que faire ? Le téléphone portable n'existait pas encore. Nous étions à la limite de la commune de Saint-Maurice.
Nous voyions au loin passer des voitures, nous faisions de grands signes, mais aucune ne s’arrêtait. Pas d'autre solution que de le transporter vers l'hôpital le plus proche.
Il me vint à l'esprit d'essayer un geste que j'avais vu faire dans une émission médicale à la télévision. Comme le pauvre homme était congestionné, je me disais qu'il serait bon de faire une entaille dans le lobe de son oreille pour faire circuler le sang afin de décongestionner le cerveau. Ayant toujours un canif dans mes affaires, me voilà en train d'essayer de cisailler l'énorme lobe gorgé de sang.
Je n’étais pas chirurgien, mon canif ne coupait pas, je tremblais, ma main hésitait, je me reprenais à plusieurs fois sous les yeux exorbités du jeune homme qui tenait, tant bien que mal, le vieillard dans ses bras. Après plusieurs entailles, le sang gicla éclaboussant nos costumes.
Hélas, le pauvre homme ne réagissait toujours pas.
Mon travail de « chirurgien-boucher » terminé, nous décidions, d'un commun accord, de transporter le mourant.
Je sortais de mon coffre un plaid, l'étendais sur ma banquette arrière et nous le coincions tant bien que mal, l’asseyant comme un passager. Mon co-sauveteur s'installait à ses côtés. On aurait dit une scène de film à la Charlot. Un frêle garçon apeuré et un énorme bonhomme aussi vif qu'un pantin désarticulé.
S'ensuivait un parcours épique car l'homme râlait, bavait, manquait de tomber à chaque virage, sa tête retombant sur l'épaule du jeune homme, livide, qui, avec son mouchoir, appuyait sur le lobe pour que le sang ne coule plus.
Dans mon rétroviseur, je surveillais le spectacle en lui demandant, à chaque minute, de bien faire attention à ce que notre homme, inerte, ne salisse rien.
Enfin, nous le déposions aux urgences de l'hôpital le plus proche sous le regard suspicieux du médecin de garde et expliquions, embarrassés, le pourquoi de ces profondes entailles. Il fut emmené au bloc opératoire.
À la réception nous déclinions nos identités à une jeune secrétaire hilare, puis le jeune homme me ramenait à ma voiture.
Quelques jours passèrent.
Nous recevions une convocation du commissariat du secteur. Après maintes explications et circonvolutions gênées, nous expliquions toute l'affaire.
L'homme étant décédé, il y eut une enquête avec suspicion sur la cause du décès. Les enquêteurs cherchant, surpris, la raison du lobe entaillé…
Nous n'en menions pas large, mais compréhensifs, les inspecteurs, après nous avoir bien fait transpirer, nous ont laissé filer. Je me souviens avoir vu comme un rictus sur leurs lèvres.
Quelques temps plus tard, la femme du brave homme décédé nous envoya un mot gentil en nous remerciant d'avoir tout tenté pour sauver son mari.
Elle nous avoua qu'il était très malade et que, malheureusement, elle s'attendait à ce qu'un jour cela arrive.
Maintenant, par prudence, pour être à la hauteur d'un autre cas identique, je fais en sorte d'avoir toujours un canif parfaitement aiguisé.
FIN

1 commentaire:

  1. une autre époque

    de nos jours ce n'est pas bon de se promener avec un couteau même un canif sans être pris pour un terroriste !

    RépondreSupprimer

michel.turquin31@orange.fr