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dimanche 9 octobre 2011

Salomé ou La randonnée Sauvage

Michel Turquin

*

Salomé

ou

La Randonnée Sauvage


Sans didascalies

Personnages

Un jeune homme : Bruno, en pyjama

Deux infirmiers : en blouse blanche
Une poupée en tenue moderne de mariée :un voile et une robe blanche
Une jeune femme dans une tente (on ne doit pas la voir) : c’est la voix. Puis, à un moment, elle apparaît dans la même tenue que la poupée, c’est La  poupée-jeune-femme. 

*

Situation : en forêt

*
Un jeune homme, Bruno, vient juste de planter une petite tente.


Il arrive, parle.
Une jeune femme,  venue de  l’intérieur, lui répond. C’est La voix

Bruno : bon … que j’me rappelle… tout est en ordre … j’ai fait le lit … rangé les chaussettes avec les tubes de dentifrice… fermé la fenêtre de l’extérieur… comme ça , ils ne verront rien… j’espère qu’le père fouettard à grosses lunettes sera constipé , comme ça, y pourra pas se promener dans les couloirs pour nous surprendre …tant pis pour les scouts… faut qu’ j’envoie un mot d’excuse à m’sieur le maire… hi hi ,on lui a gâché sa cérémonie…tu verras Salomé la grande maison que j’vais te construire... j’ mettrai des plumes et des coussins partout pour que tu puisses bouger sans t’faire  mal…faut qu’je lui trouve des fleurs… Que des tomates et une salade… j’espère qu’il n’y a pas une limace dedans , j’ai peur des limaces , c’est trop gluant quand ça vous lèche… Salomé ?… Salomé … ?
Sous la tente, La voix : ouiiii …
Bruno : ouf, j’ai enfin trouvé de quoi manger.
La voix : je suis très contente mon amour, je commençais à avoir faim.
Bruno : pas grand chose, tu sais, avec les êtres du jour,  faut s’ montrer prudent.
La voix : je te fais confiance.
Bruno : cette fois ci, j’crois bien qu’ils ne nous retrouveront pas, là, bien planqués dans cette  forêt.
La voix : tu es si malin mon amour, cet endroit est parfait, il y a plein de papillons, sans épingle, ni bouchon…
Bruno : … et même des écureuils, magnifique hein ? Quelle randonnée… depuis quatre jours qu’on tourne en rond… mon amour ?… Salomé ?… Salomé ?…
La voix : ouiiii ?
Bruno : les Anges blancs, avec leurs gros sabots...hi hi, y doivent arpenter tout le pays, c’est bien fait pour eux… Salomé ?… Salomé ?
La voix : ouiiii ?
Bruno : t’es bien ?
La voix : j’ai un peu froid, surtout dans cette tenue… tu aurais  quand même pu emmener un lainage  bien chaud, tu n’es pas gentil… brrr… j’ai froid.
Bruno : c’est que… partir en pleine nuit en suivant le chat noir du concierge, pas facile tu sais.
La voix : quand même !
Bruno : pardon mon amour, cette nuit, au village, j’essaierai d’en voler un pour toi, promis, j’ai repéré des vêtements dans une cabane, près d’un potager.
La voix : chéri, n’oublie pas d’en trouver pour toi aussi, tu te négliges en ce moment.
Bruno : Salomé ?
La voix : ouiiii ?
Bruno : on est bien installé, hi hi, on les a bien eu les Anges blancs… Salomé ?… Salomé ?…Tu m’entends ?
« Silence »
Bruno : Salomé ?… Salomé ?…
La voix : ouiiii ?
Bruno : et ben, réponds quand je te parle.
La voix : ouiiii ?
Bruno : tu m’aimes ?
La voix : tu le sais bien, gros bêta, la preuve.      
Bruno : je t’aime…. je t’aime depuis toujours, depuis la nuit des temps, depuis que l’univers a été créé. J’crois bien qu’on vient  de la même étoile  .Tu sais, c’est pour toi que je m’suis sauvé du château, y voulaient encore une fois  nous séparer. J’aurais pas pu le supporter,  j’en serai devenu complètement dingue, et toi ?
La voix : moi aussi mon amour, être coupé en deux, cela fait mal, tu sais bien qu’il n’y a qu’en ton âme que j’existe, toi et moi ne faisons qu’un.
Bruno : Salomé ?
La voix : ouiiii ?
Bruno : j’espère que dans la précipitation, à cause de tes petits doigts, t’as pas perdu ton alliance ?
La voix : non grand fou,  elle est trop précieuse… et toi ?
Bruno : … c’est que …
La voix : quoi ?
Bruno : y m’l’ont retirée là-bas, avec tous mes vêtements.
La voix : les cochons, même pas de respect pour un jeune marié.
Bruno : Salomé ?
La voix : ouiiii ?
Bruno : tu veux prendre l’air ?
La voix : oui, toute seule, je commence à m’ennuyer là-dedans, et puis je veux profiter de cette  belle nature, respirer les fougères, mieux, écouter les oiseaux, me rouler dans la mousse, caresser  les doux papillons, donner à manger aux écureuils.
Bruno : o.k, d’accord, à présent y z’ont du perdre notre trace, nous ne risquons plus rien
La voix : vite Bruno, je brûle de désir d’être dans tes bras, de sentir ton parfum, ta chaleur, voir le ciel rouge, les nuages en coton, rêver …rêver…rêver … 
« Bruno entrebâille à peine l’ouverture de la tente et en sort une jolie  poupée habillée en mariée. »
Bruno : viens ma belle, ma douce, pose ta tête sur mon épaule, là …nous voilà enfin tous les deux, loin de ces horribles monstres.
La poupée « c’est la voix venue de l’intérieur de la tente qui parle » : Bruno,  cela me rappelle quand nous étions enfants, à l’école, déjà tu me dorlotais au lieu de jouer avec tes copains .Nous jouions au papa et à la maman derrière l’église, en douce de nos parents .A la récré tu volais des cerises pour me les accrocher aux oreilles...
Bruno : …et je les croquais en te chatouillant, hum !c’était bon.
La poupée-voix : tu as toujours été un coquin Bruno .J’ai l’impression de revenir en arrière où tout était bleu et rose, contre ta poitrine je suis vraiment bien, et toi ?
Bruno : moi aussi.
La poupée-voix : tout s’est passé si vite…
Bruno :... pourtant la journée s’annonçait  merveilleuse, pleine de promesses.
La poupée-voix : j’ai tellement eu peur quand je suis tombée à l’eau…
Bruno : … juste le jour de notre mariage… quelle poisse … un jeu stupide.
La poupée-voix : tu te souviens ?
Bruno : oui mon amour, t’étais  adorable dans cette ravissante tenue .Tout le monde s’amusait, les invités, un peu pompettes riaient, les petits garçons sautaient partout, les petites filles faisaient la ronde, les vieux s’empiffraient de cochonnailles. Et puis soudain, j’ai cru à un moment que tu  nous faisais une blague, debout, dans la vieille barque du père Julien…


La poupée-voix :… et ça bougeait, ça bougeait…  une blague, oui c’est ça… nous avons fait une grosse farce à tout le village.
Bruno : qu’est- ce qu’on a rigolé.
La poupée-voix : ouiiii, si on veut ?
Bruno : tu sais ?
La poupée-voix : quoi ?
Bruno : j’ai décidé de t’apprendre à bien nager.
La poupée-voix : oui, oui, comme ça à notre prochain mariage, mon amour, tu ne pleureras pas, et surtout, rien que pour toi, je mettrai un maillot de bain très sexy.
Bruno : blanc ?
La poupée-voix : oui, avec de la dentelle rose et des pompons mauves, comme celui du printemps  dernier.
Bruno : Salomé, s’il te plaît, arrête, j’ai mal,  j’veux plus pleurer… et puis maintenant qu’on est ici, ça va être la fête, j’vais chasser, j’irai puiser de l’eau à une source, j’ volerai des légumes, des fruits dans les jardins, j’cueillerai des champignons .Sous la pluie, nus, nous nous doucherons, près d’un feu de brindilles nous nous sécherons .J’ mettrai des oiseaux en cage Ah ! Tu verras, tu verras… ça va être notre voyage de noce… ah ! Tu verras, tu verras
La poupée-voix : oh !ouiiii…ouiiii…. Bruno, un voyage comme personne n’en a déjà eu … je suis si heureuse… Bruno ?
Bruno : oui ?
La poupée-voix : s’il te plaît, s’il te plaît ?
Bruno : quoi ?
La poupée-voix : pas les oiseaux en cage, laisse-les libres.
Bruno : d’accord… attention Salomé… j’entends du bruit… on vient… vite… cache toi.
La poupée-voix : ce sont les méchants Anges blancs ?
Bruno : j’crois bien.
« Bruno essaie de cacher la poupée »
Infirmier  1 : trop tard Bruno, qu’est-ce que tu planques ?
Infirmier  2 : ha ha ha, sa poupée bien sûr, tu as réussi à l’emporter, salopard.
Infirmier  1 : allez donne-nous ton  jouet, petit vicieux.
Bruno : j’suis pas vicieux, ne la touchez pas, ne la touchez pas… c’est ma femme… c’est Salomé …
Infirmier 2 : mais oui… mais oui.
Infirmier 1   : dis donc, qu’est-ce qui te prend de nous faire cavaler comme ça depuis plusieurs jours, tu n’es pas bien chez nous ? Cajolé, dorloté, nourri, aux petits soins.
Infirmier 2 : Bruno, oh ! Mais… ce n’est pas une tenue pour te promener dans le monde, allez viens, nous allons te trouver un joli  costume à ta taille, bien plus sympathique.   
La poupée-voix : ne résiste pas mon amour, ils peuvent être violents, regarde leurs sales têtes, rappelle-toi au château comment ils nous ont malmenés. S’ils te touchent, je les griffe, je les mords. 
Bruno : vous l’avez entendue, vous l’avez entendue,  elle est pas commode ma femme hein ?
Infirmier 2 : oui mon coco, j’ai entendu comme qui dirait un merle, et même un fameux merle, toi Bruno.
Infirmier1 : tiens c’est vrai … par contre, moi j’ai également entendu voler un moustique .Un gros avec d’énormes lunettes qui pourrait bien te faire une désagréable piqûre.
Infirmier 2 : hé hé.
Bruno : mais non... c’est elle, bon sang, écoutez, c’est Salomé.
La poupée-voix : Bruno, j’ai peur, nous allons être encore séparés. Je sens déjà une douleur dans mon corps.
Bruno : Salomé, tu vas rester ici quelques jours, comme ça j’aurai le temps de m’habituer à la solitude et au père moustique, je vais les calmer puis tu m’rejoindras.
La poupée-voix : bououou… et comment je ferai ?
Bruno : ne boude pas mon amour, tu passeras par la cheminée du grand salon, t’es si souple.
La poupée-voix : oui, c’est une super-solution.
Infirmier 1 : le pauvre, il parle aux arbres.
Infirmier 2 : Bruno, mon grand, arrête tu parles tout seul, écoute… il n’y a pas de Salomé ici, ce que tu entends, ce ne sont que les bruits de la forêt qui résonnent dans ta caboche fêlée, rien de plus, tu te fais des idées.
Bruno : c’est pas vrai… c’est pas vrai, vous mentez.
Infirmier 1 : nous menteurs ? Tu ne manques pas de culot. Cette poupée  n’est qu’une poupée Bruno, rien d’autre, jamais elle ne pourra remplacer ta pauvre femme.
Infirmier 2 : Bruno,  malheureusement Salomé est  morte depuis plus d’un an, bien morte, noyée, je t’en prie,  suis nous tranquillement, sans résistance.
La poupée-voix : mon amour, maintenant je suis si fatiguée, j’ai l’impression de mourir, allonge-moi sous la tente  s’il te plaît… et puis, touche ma peau, je grelotte… après,  pars avec eux.
« Délicatement Bruno met la poupée sous la tente sans ouvrir complètement l’ouverture ».
On ne doit toujours pas voir la comédienne cachée à l’intérieur
Bruno : tranquillise-toi, voilà… t’as chaud ?
Infirmier 1 : que fais-tu Bruno ?
Bruno : Salomé est très fatiguée, je l’ai mise sous une couverture.
Infirmier 2 à infirmier 1 : surtout ne le contrarions pas, laissons-le faire, nous reviendrons dans un moment prendre la tente et cette fichue poupée.
Infirmier 1 : alors… tu viens Bruno ?... ou je te ficelle comme un vulgaire gigot.
Bruno : j’vous suis, j’vous suis, ne vous énervez pas.
Infirmier 2 : c’est bien mon petit, tu vas retrouver tes camarades de classe, tu leur manques, en particulier ton charmant voisin de chambre, tu sais, celui qui se prend pour une limace.
Infirmier no 1 : ha ha 
«À ce moment, en s’ébrouant, sort de la tente une jeune femme habillée exactement comme la poupée. »
Bruno : Salomé, mais… que fais –tu ? Sauve-toi vite.
La poupée-jeune-femme : chutttt, je te suis, si tu croyais que j’allais te lâcher en compagnie de ces sales types.
Bruno : mais y  vont t’enfermer aussi, Salomé…j’veux pas.
La poupée-jeune-femme : impossible qu’ils m’attrapent,  je coure bien plus vite qu’eux, Bruno ?
Bruno : quoi ?
La poupée-jeune-femme : regarde, regarde, leurs cerveaux sont vides, il n’y a que d’affreux courants d’air, glacés, froids,  c’est la Sibérie.
Bruno : la Sibérie ? T’exagères Salomé.
La poupée-jeune-femme : mon amour, dans leurs têtes, dans leurs cœurs, as-tu ressenti  de la lumière, as-tu entendu des mots qui viennent du soleil, as-tu perçu de la chaleur dans leurs propos ?
Bruno : non, non, pas vraiment.
La poupée-jeune-femme : donc, c’est la Sibérie, et puis regarde-les, on dirait deux féroces ours blancs en chasse.
Bruno : hi hi , que t’es drôle.
Infirmier 2 : à qui parles-tu Bruno ?
Bruno : à ma femme pardi… regardez comme elle est belle, élégante, et si intelligente.
Infirmier 2 à infirmier 1 : tu vois quelque chose toi ?
Infirmier 1 : rien de rien, et pourtant j’ai une bonne vue... ah ! Si, je vois un superbe  asticot qui commence à me taper sur le système.
Bruno : vous… vous ne la voyez pas ? Elle est là, juste à mon côté, regardez, là où il y a de la neige, sur la mousse.
Infirmier 2 : bien sûr, bien sûr, de la neige en plein été, c’est courant, arrête de te moquer de nous, et puis, je t’assure Bruno qu’il n’y a personne ici à part toi et nous deux.
Infirmier 1 : je sens que je vais me fâcher, je vais te faire goûter à la mousse, moi, et pas à celle d’une bière.
La poupée-jeune-femme : tu vois mon amour, ils ne nous croient pas,  je te suis jusqu’au château des merveilles. « En douce », comme promis, je viendrai dans ta chambre, je m’allongerai près de toi, nous ferons l’amour comme d’habitude, nous serons heureux... tu verras, tu verras.
Bruno : d’avance, j’en tremble d’émotion…Salomé ?… Salomé ?…
La poupée-jeune-femme : ouiiii ?
Bruno : j’ai déjà ma p’tite idée.
La poupée-jeune-femme : quelle idée ?
Bruno : un voyage encore plus merveilleux.
La  poupée-jeune-femme : ouiii… et où mon chéri ?
Bruno : au cœur de l’Afrique, dans la jungle, une vraie randonnée sauvage, où  y a de magnifiques oiseaux de toutes les couleurs comme tu les aimes .Pas d’Ange blancs, que des gentils noirs.
La  poupée-jeune-femme : ouiiii, bravo, bravo, j’adore.
Bruno : et puis comme ça t’auras moins froid.
Infirmier  1 : alors tu viens Bruno ?
Bruno :… On arrive, voilà, voilà, on arrive.
« Tout le monde part »
L’infirmier 1 à l’infirmier 2 : pauvre Bruno, toujours halluciné ….


FIN





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